Etincelles

Tu avais bossé pour cet évènement ! Comme une folle ! Et si tu aimais les spectacles de coordinations, réellement, la photo, l’étude pokémon, ça, c’était la base de tout à tes yeux. Tu pouvais passer des heures dans une fourrée, sans bouger un cil, à l’affut de cette petite et minuscule seconde parfaite, où tout prenait sens. Et ça finissait par payer. Aujourd’hui, c’était l’occasion de montrer la beauté de pokémon dans cette petite galerie où tu avais pu organiser une exposition dont le sujet principal se trouvait être la cohabitation entre les pokémon de type plante. Leurs échanges. Leurs amitiés. Leurs conflits. Tout ça, sur les murs, transparaissait comme une vérité claire et à la fois nuancée. Et il y avait du monde pour observer ton œuvre aujourd’hui ! Tu avais été surprise de voir autant de visages curieux et nouveaux dans le centre d’exposition. Certains t’avaient découvert via tes réseaux sociaux, d’autres, grâce à ta dernière représentation aux côtés de Cali Cobalt. Un coup de pub qui n’était pas de trop, là où beaucoup commençaient à voir les pokémon comme une réelle menace après cinq ans de bourrage de crâne.

Et puis, les heures ont passées. La foule s’est faite moins épaisse et, petit à petit, le temps de fermer s’est rapprocher, t’offrant enfin un moment de repos. Un soupire, léger, passa la barrière de tes lèvres tandis que tu décalais doucement ton regard sur la photo, sous un format gigantesque, exposée juste à tes côtés. Le ballet des Chlorobules et des Croquines s’alliant pour produire cette boisson, infusée de feuilles de Chlorobule et de sueur de Croquine, sous la lumière filtrée par les branchages ... Des produits qui, pendant longtemps, avaient été utilisés également par les humains. Un don que la nature avait offert, généreusement, et que le gouvernement avait rendu illégal. Pensive, une seconde, tu laissas tes doigts effleurer la surface du papier glacé




Et puis soudain, une voix qui résonne. Qui te fait sursauter. Face à toi, un jeune garçon, pas plus vieux que toi et à la chevelure blonde se dressait. Énergique, curieux, il semblait bien décidé à te parler. Tu n’avais même pas eu le temps de dire un mot que déjà, il te félicitait pour ton travail, avant d’enchaîner sur une demande d’interview. Surprise, décontenancée, tu semblas hésiter une seconde, avant de te reprendre. Tu étais là pour défendre ton point de vue, une interview, c’était une occasion en or. Une chance de gagner encore un peu en visibilité. Alors, à ton tour, tu le gracias d’un grand sourire solaire.

« Merci beaucoup pour ton retour ! Est-ce que tu suis mon travail depuis longtemps, ou bien est-ce ta première visite ? »

D’un geste de la main, tu l’invitas à te suivre jusqu’à une petite table installée dans un coin de la galerie, où reposait un immense pichet de citronnade et quelques petits fours, épargnés par la foule de visiteurs.

« Est-ce que tu es journaliste ? Pour quel journal ? »

Pourquoi tant de questions ? Oh, parce que tu restais toujours méfiante. C’était devenu un réflexe. Beaucoup t’avaient approché pour les mauvaises raisons. Pour faire de toi une coupable, simplement par ton nom et depuis que tu avais rejoins la résistance, dans l’ombre, tu le savais : Tu devais être encore plus prudente. C’est sur cette pensée que tu finis par prendre place sur une des chaises blanches, relevant le nez une seconde pour annoncer, d’une voix forte.

« Arashi, ne t’éloigne pas ! »

Un cri du petit Lixy résonna dans la pièce, avant que tu ne te concentres sur ton invité imprévu, calmement.

« Je sais pas trop par où commencer, vous auriez des questions précises par hasard ? »

Et comme ça, il allait te dévoiler un peu son jeu ...

Etincelles

Le jeune garçon était plutôt du genre franc. Clair. Net. Précis. Assez pour t’annoncer de but en blanc que non, il n’était pas journaliste. Non, face à toi, c’était un membre de la guarda qui se dressait, avec un sourire et toute l’innocence d’un enfant. Une déclaration qui aurait pu te secouer fortement, si tu n’avais pas appris à contrôler tes expressions. Tu étais dans un sens, l’ennemie de ce garçon mais là où reposait ton avantage, c’est qu’il n’en savait rien. Cordiale, polie, calme et honnête. Voilà comment tu allais la jouer. Et pourquoi ? Parce qu’un bon mensonge, c’était celui qui était entouré dans un manteau épais de vérité et que tu ne comptais pas le laisser suspecter une seule seconde ton appartenance à M.U.N.J.A. Alors le plus naturellement du monde, tu lui servis un verre de cette citronnade si fraiche, avant de lui tendre le plateau de mignardises.

« Vraiment ? Je n’ai pas l’habitude de voir des membres des autorités venir voir mes œuvres. »

Tu vis sa nervosité. Ses mots s’embrouiller alors que dans le coin de ton champs de vision, le petit lixy d’or approchait, portant fièrement sur son adorable petite tête un béret comme s’il était l’artiste star de la journée. Cette peur, dont tu ne peux pas saisir la raison, c’est une nouvelle carte en ta faveur. La chance de voir un peu plus ses réactions. Du lui embrouiller l’esprit et d’être sûr qu’il n’est pas là pour plus. Invitant Arashi à sauter sur tes genoux, voyant pâlir le pauvre garçon, tu posas une nouvelle question avant de répondre au sienne. Un appât juteux pour le distraire.

« Comment as-tu découvert mon travail ? La dernière fois qu’un membre de la guarda m’a interpelé, c’était plutôt en lien avec mon père. J’avoue que je suis surprise. »

Partir sur ton père, comme ça, de but en blanc, c’était simplement détourner l’attention de quelque chose de possiblement plus profond. C’était cacher l’arbre derrière la forêt. Un petit sourire aux lèvres, caressant le haut du crâne de petit animal, tu laissas quelques secondes au blond pour réagir. Quelques secondes où tu observas tout chez lui. Ses mimiques. Son langage corporel. Tout ça, ce n’était pas si loin de l’étude pokémon dans un sens.

« Je vois qu’Arashi vous mets mal à l’aise, mais il est inoffensif. Vous n’avez rien à craindre. »

Et toi, tu n’avais plus à le torturer comme ça. Cet instant en tête à tête avec le petit félin t’avais permis de t’assurer que sa peur du lixy d’or n’était pas une comédie. Alors, tu dégainas la pokeball de ton sac, invitant Arashi à y entrer et à libérer Spike de ses angoisses. De nouveaux, vous étiez seuls à cette table et, le cœur plus léger, tu pouvais répondre à ses questions.

« Désolée, il est quelque peu ... câlin. Pour revenir à nos moumoutons, je prends en photo en grande majorité les pokémons dans leur écosystème sauvage. Je travaille au laboratoire de recherche de Borao. J’étudie plus précisément pour devenir professeur pokemon. »

D’une main, tu désignas l’immense photo à côté de laquelle tu te trouvais un peu plus tôt. Celle même qui imageait parfaitement l’amitié entre Chlorobules et Croquines.

« Pour cette photo par exemple, j’ai commencé par suivre un petit Chlorobule car il portait des baies dans ses feuilles, puis, je me suis cachée dans une fourrée le temps que tout ces petits compagnons le rejoignent. Je suis restée ... hmmm ... quarante minutes sans bouger avant de pouvoir saisir ce moment ? J’ai toujours du mal à dire, je suis souvent trop concentrée pour penser à autre chose. »

Ce qui expliquait la douleur lancinante dans ton dos qui t’avait forcé à rester allongée toute la journée d’après, tant ton muscle était resté tendu longtemps dans une unique position.

« Tu vois, je ne peux pas provoquer ce genre de moment. Je dois me balader dans les zones sauvages longtemps et discrètement. Parfois, je me perche dans un arbre, je trouve une petite crevasse pour me dissimuler. »

Un petit rire t’échappe, alors que le souvenir d’un racaillou interloqué de te trouver entre deux roches te revient à l’esprit.

« Je voudrais prendre plus de photos en ville mais avec le nouveau gouvernement, ils sont plus rares qu’avant et les gens qui en possèdent préfère rester discrets. Je comprends et je respecte ça. »

Et pourtant, tu aimerais tellement pouvoir montrer ce lien fort entre pokémons et humains. Cette beauté dans le respect de l’un et de l’autre. Dans cette cohabitation délicate. Mais tout ça, ce n’est plus aussi facile qu’avant. Et puis, enfin, tu attaques la dernière de ses questions : Pourquoi ? Pourquoi la photographie, plutôt qu’autre chose ?

Lentement, tes mains se serrèrent autour du précieux appareil et ton regard se baissa sur celui-ci. Tu semblas absorbée par tes pensées, quelques secondes. Les souvenirs, à la fois joyeux et amères, se fracassaient contre ton pauvre petit cœur. Un soupire passa la barrière de tes lèvres, mélancolique, avant que tu ne redresses le nez, de nouveau avec un sourire.

« J’ai commencé à photographie grâce à mon père. J’avais du mal à me faire des amis et j’étais bien plus proche des pokémons que des humains. Alors, il m’a offert un appareil, et puis, il m’a expliqué qu’avec la photo, on pouvait créer des liens avec les autres. Transmettre ses émotions et graver à jamais des souvenirs précieux. Qu’est-ce que tu en penses ? Est-ce que mon travail est capable de te montrer tout ça ? Tout cet amour que j’ai pour les pokemon ? »

Pouvait-il voir ton cœur ? Ou étais-tu encore trop faible pour ça. Ta voix était elle encore muette, dans le chaos de la vie ?