Pour quelqu’un qui aime autant l’histoire Cynthia possède un manque étonnant d’album photo. Ce n’est pas tant qu’elle n’aime pas apparaitre dessus, quoi qu’il y ait un peu de ça aussi, mais plus qu’elle avait quitté sa maison en claquant la porte et la promesse de ne jamais revenir, l’album photo était bien le dernier de ses soucis.
Mais imaginons un instant qu’elle ait pu l’emmener.
Les premières photos seraient des photos de bébé typique. Rose, un peu humide, la bouche ouverte dans un hurlement à vous péter les tympans. Un classique. Avec un peu de chance, on pourrait y apercevoir sa mère aussi, Evelyn Jenness. Blonde comme sa fille, l’air sérieux mais souriante et toujours propre sur elle. Avocate de passion, elle aspire à plus et compte bien offrir à Cynthia une vie de rêve, après tout c’est son bébé et elle mérite le meilleur. De l’autre côté il y a son père, Adrian Hawthorne, bruns, les cheveux en pagaille une barbe de trois jours et un tee-shirt tâché – il a toujours été incapable de sortir d’un repas sans un petit accident.
La suite de l’album sera complétée avec diverses photos de la famille dans les rues de La Isicao. La plus belle ville de la région si l’on en croit leurs avis. Vers les deux ans de Cynthia sa mère ne sera plus sur aucune photo. Elle était partie à Galar pour une grosse affaire qu’elle ne pouvait refuser et n’aura pu revenir que lorsque sa fille aura atteint sa quatrième année. Après cela, Adrian et Evelyn n’apparaissent plus ensemble sur les photos, sauf quelques rares occasions où leur habituel sourire était manquant.
Sur la majorité des photos, Cynthia a le nez dans un bouquin. Impossible de la faire lever les yeux et les rares clichés qui ont pu être pris sont flous. Il y a bien sûr les quelques photos de classes où elle sourit timidement avec les yeux fermés parce que le photographe, il est pas doué, ou dans la cour de récré un ballon au pied les sourcils froncés tellement elle est concentrée – Evelyn râlait sur le fait que sa fille fasse toujours des grimaces. Quelques visages réapparaissent sur plusieurs photos, des amis. La vie est paisible malgré les silences pesant aux repas.
Lorsqu’elle rentre dans la jeune adolescence, ses parents se plaignent qu’elle ne leur parle pas. Ils s’inquiètent pour elle, pas pour ses notes, qui à part en dictée sont toujours bonnes, mais bel et bien pour son développement social. La maitresse d’école leur apprend qu’elle a beaucoup d’amis et que c’est une pipelette. Toujours la première à démarrer la conversation, tendre la main pour inviter ses camarades à jouer mais aussi à assommer son enseignante de faits variés sur les mythes de la région. Elle s’est aussi fait une petite réputation dans la bibliothèque du quartier et les libraires l’accueillent avec les nouveautés qu’elle a commandé. Elles étaient arrivées à court de documentaires pour les enfants de son âge depuis plusieurs années, Cynthia était passé à la tranche d’âge du dessus. Ses parents n’étaient au courant de rien de tout ça.
Ça ne surprend personne lorsque qu’il y a un trou dans l’album. C’est la période du divorce, alors forcément les photos ça passe un peu à la trappe. Evelyn avait trouvé quelqu’un durant son temps à Galar. Un homme du nom de Richard qui avait des yeux doux et un sourire gentil. Ils avaient eu Marcus aussi, il était venu un peu comme un cheveu sur la soupe ce demi-frère. De deux ans son puiné. Au final, lorsque le juge avait demandé Cynthia avait choisi de rester avec son père. Il lui avait dit que sa mère était méchante et elle l’avait cru, après tout elle n’aimait pas vraiment Marcus et partir lui faisait peur. Elle avait tous ses amis ici et comment ferait-elle pour visiter les ruines Cinzannes en étant à Galar ? Son père lui avait promis de l’y amener, chaque année il lui dira qu’il avait oublié et que l’année prochaine promis, il l’y emmènera. Elle avait appris que son père était un menteur.
Sur les nouvelles photos Cynthia a 15 ans. Son père a mal tourné mais ce n’était pas surprenant, policier vendu il a réussi à s’endetter à pas mal de gars louches. La fillette ne pense qu’à une chose, partir. Pourtant elle est coincée là, à devoir aider Adrian et sa clique. Au moins elle est libre de parcourir la ville, de supplier la grande statue qu’Arceus l’entende et lui offre un monde meilleur. Elle regrette de ne pas être partie avec sa mère lors qu’elle en avait l’opportunité.
Sur certaines des photos on voit un homme. Lazarus Silvia. Un homme au regard dangereux et à l’allure travaillée. C’est le chef des opérations, le showman. Ancien rejet de la ligue, il vit de paris illégaux et crime d’envergure variable. Adrian est son contact dans la police. Quant à Cynthia… c’était l’opportunité rêvée de se faire un peu d’argent facilement. Il décida de l’envoyer en quête des badges. Avec sa bouille d’enfant et ses cheveux blond il pariait sur le fait que personne ne la prenne au sérieux pour se récupérer de la thune sur les sites du darknet. Un plan sans faille. Si seulement il savait.
C’était l’opportunité du siècle pour Cynthia. Ou du moins la seule qu’elle avait pour sortir de cet enfer. Pour l’aider dans ce méfait, Lazarus lui offrit son premier pokémon. Une griknot chétive qui avait une haine toute particulière contre tout ce qui s’approchait trop près de sa face. Il l’avait récupéré d’un trafiquant, la bête était bonne pour l’abattoir. Si son coup réussissait il était riche, si Cynthia et cette chose se révélaient être des déceptions, il n’aura qu’à les rajouter à sa collection de jouets cassés. L’homme pariait sur la hargne de la créature et il n’avait pas tort. C’est cette rage de vivre qui porta leur duo face à de nombreux obstacles. Une détermination à toute épreuve.
Cette griknot, son nom était Malta. Nommée d’après un lieu oublié d’une contrée lointaine qui avait passionné Cynthia. Elle n’aimait pas sa dresseuse. Ni la région. Encore moins la nourriture. En fait elle n’aimait pas grand-chose. Ça tombait bien, Cynthia n’avait pas grand-chose. Les débuts furent difficiles. Il fallait déjà remettre la bestiole sur pied puis apprendre à naviguer seule dans un monde beaucoup plus grand que ce que les cartes suggéraient. Armées de patience mais surtout de désespoir, les deux ont dû apprendre à se soutenir face au monde et petit à petit, à s’aimer.
Il y a une photo dans cet album qui n’est pas la sienne. Elle vient d’un compte instagram, celui de Marcus Jenness, son demi-frère. On peut y voir Cynthia, les yeux remplis de larmes, les poings serrés entrain de proliférer des insultes. Pour lui c’était une célébration de sa victoire, petit prodigue qu’il était, le monde lui tendait les bras. Son sponsor allait être heureux et ce bonheur-là pouvait être lucratif. Pour elle c’était plus qu’une défaite, elle n’avait rien si ce n’était son pokémon. Lazarus allait être déçu et cette déception-là pouvait être mortelle. Ce jour-là, elle s’est rendu compte que peut-être, elle détestait sa mère.
Attrapant Malta et le peu de choses qu’elle avait sur le dos, elle coupa toutes les relations avec son père et sa bande organisée. Protégée par les centres-pokémons qui lui offraient asile et gagnant quelques sous grâce à ses victoires et des petits jobs çà et là, elle poursuivait la mission qui lui avait été confiée, faute de mieux. Ce fut une période difficile mais qui ne renforça que plus les liens unissant la fille et son dragon. Elles avaient appris à se tolérer, maintenant qu’elles dépendaient de l’autre, c’était une confiance à toute épreuve qui se construisait.
Les prochaines photos la voient grandir, 2 ans ont passé depuis qu’elle a débuté son aventure. La même époque vu son équipe s’étoffer au fur et à mesure des badges, bientôt on aurait dit une véritable dresseuse. Elle avait plusieurs fois recroisé Marcus, n’avait jamais gagné, ses pokémons sol ne faisaient pas le poids. Elle ne se décourageait pas, elle avait le soutien et la force de Malta.
Ce qui la terrifiait le plus était le silence total du côté de Lazarus, c’était comme s’il l’avait oublié. Alors elle osait espérer. S’amuser. Libre de toute contrainte malgré la menace qui planait, elle pu gouter à la vie comme jamais et ce malgré ses tentatives répétées pour mourir de la manière la plus stupide possible – Note à soi-même : On ne peut pas se tenir debout sur un carmache en plein vol même si ça a l’air putain de cool. Elle pouvait explorer les ruines comme elle en avait toujours rêvé, rester dans les bibliothèques de l’ouverture à la fermeture, coller son nez sur les vitrines des musées, bouffer jusqu’à en vomir, chanter, danser, célébrer la région de Cinza.
Marcus et elle se retrouvèrent à la Coupe des Champions. Le tournoi final visant à sélectionner les dresseurs ayant obtenus leurs cinq badges pour savoir lequel aurait l’honneur de tenter sa chance face à l’élite des 4 et le Maître. Cette fois-ci elle et son équipe étaient prêts. Elle affrontait Marcus en quart de final. Leur photo avait été publiée dans les journaux de l’époque. Une image en noir et blanc qui révélait d’autant plus tout ce qui opposait ces deux-là, elle toute de noir vêtu avec des vêtements de seconde main, lui en tenue albâtre frappé de logo de marques de luxe. Elle avait revu sa mère aussi. Apparemment elle et Richard avaient décidé de venir habiter à Cinza, d’où la présence de son demi-frère dans la compétition. Peu importait. Elle ne voulait pas la voir. Elle lui en voulait toujours de ne pas s’être plus battue pour elle, d’avoir mal jugé Adrian.
Le jour fatidique un messager vint la voir portant un emblème familier. Lazarus Silvia. Elle se rendait compte que la laisse à laquelle elle était attachée s’était détendue pendant quelques temps mais jamais ne l’avait quittée. Lazarus voulait lui parler. Elle savait qu’elle ne pouvait pas refuser. Sa demande était simple. Perds le match. Il avait parié sur le fait que Marcus gagne le tournoi. Il ne pensait pas grand-chose d’elle, elle n’était pour lui rien d’autre qu’une petite créature gesticulante qui pouvait peut-être se montrer utile, comme maintenant. Il n’avait aucun doute qu’elle lui obéisse. Il la sous estimait.
Ce titre, elle s’était battue avec ses pokémons pour l’avoir. Ils méritaient leur place, avaient gagné leur place de la même manière qu’ils comptaient arracher la victoire à leurs opposants. Il était temps de se concentrer sur l’avenir.
Le jour J, les coups s’échangèrent. Intenses. C’était une rivalité qui datait. Marcus devait tomber ! Pour Malta, pour l’équipe- Et si Lazarus décidait de répliquer ? S’il s’en prenait à son père ? Elle hésita. Elle revoyait son visage froid et calculateur, savait de quoi il était capable. Le combat qui penchait en sa faveur, Marcus n’avait plus qu’un pokémon, elle-même en avait deux. Elle regarda dos de sa carmache qui se battait comme un beau diable face au pyrobut de son demi-frère. Ses rugissements faisaient tambouriner son cœur avec une certitude. Elles pouvaient gagner. Elles allaient gagner.
La tête entre les mains, elle avait pu entendre la foule applaudir lorsque son demi-frère récupéra la première place de la compétition. Si elle avait su que ce serait son dernier combat légal, elle n’aurait peut-être pas pris la même décision. Ou du moins elle essayait de s’en convaincre. Est-ce que les choses auraient été différentes si elle avait gagné ? Si elle était devenue Maître ? Elle ne le saurait jamais. La roue avait tourné, le destin décidé. Lazarus avait gagné. Malta refusa de lui parler pendant de longs mois. De toutes les choses c’était ce qui l’avait le plus blessée.
Elle abandonna complètement la ligue. Un mystérieux bénéfacteur lui avait aussi mis quelques sous sur son compte. Chaque mois elle recevait des versements sans explication. Elle ne voulait pas y toucher, de peur que ce soit Lazarus. Sa participation au tournoi lui permit d’obtenir une bourse pour suivre des études en archéologie après l’obtention de son bac à la limite des points. Elle avait beaucoup à rattraper mais elle n’était pas la seule dans ce cas-là. Beaucoup de dresseurs avaient de longues périodes vides et les universités avaient prévu des cursus de rattrapage. Elle se trouvait idiote sur la photo de la carte étudiante mais fière aussi. Elle n’aurait jamais pu imaginer arriver ici.
L’arrestation des Champions et officiels de la ligue la toucha en plein cœur. La région mourrait avec elle, meurtrie, désabusée. Elle savait qu’elle devait préserver l’histoire. Cinza c’était les combats, qui avaient été son premier amour et lui avaient laissé un cœur saignant et une rage insoumise. C’était aussi les traditions vieilles comme le monde, ses plats partagés lors des nuits froides, blottie l’une contre l’autre. C’était la vie des pokémons, loyaux à en mourir. Et l’honneur des hommes, les fous, les heureux, les rêveurs.
C’était une cause qui méritait de se battre pour.
Il n’y avait pas de photo de ce moment mais Cynthia le porte sur le corps. La cicatrice que lui avait infligée Malta. Une vilaine morsure sur le bras gauche alors qu’elle essayait désespérément de s’accrocher à elle pour ne pas la quitter. Même une fois le gaz Pérola administré les réguladors avaient dû utiliser un pied de biche pour déloger sa mâchoire. Son père avait refusé de l’aider à payer le pass, elle avait juste eu besoin d’une avance en attendant la fin du mois. Il s’était fait endoctriner par la propagande comme tant d’autres avant lui. Faible d’esprit comme de cœur. Elle n’aurait pas dû être surprise. Pourtant elle aurait souhaité qu’il en soit autrement.
Un par un, elle se fit arracher ses pokémons. Se battant bec et ongles pour les garder. Les dents fermement plantées dans la peau d'un regulardor, elle hurla lorsque Malta fut trainée en dehors de la maison, muselée comme elle l’avait été lors de leur première rencontre. Elle eut beau frapper, casser, supplier, rien ne les ébranla. Et juste comme ça, dans la banalité d'un jeudi après-midi, sa vie était finie.
Les autres clichés sont des pages de notes pour qu’elle puisse réviser où qu’elle soit. Elle avait officiellement coupé les ponts avec son père, elle l’avait voulu hors de sa vue, hors de sa vie. Table rase. On efface tout même si l’éthique de l’archéologue prône le contraire. Elle se perdit dans ses études, trouvant du réconfort dans les vieilles ruines de la région qui avaient survécu au passage du temps. Modèles de stabilité, elles promettaient un monde meilleur. Elle n'avait évidemment pas abandonné l'idée de revoir ses compagnons, ce serait mal la connaître. Quand elle n'était pas en train d'étudier, elle parcourait les réseaux de l'underground dans l'espoir de voir une tête familière. Le soir son appartement était vide, les casseroles s'empilaient dans un tas qui menaçait de tomber et le balai n'avait pas gouté à la poussière depuis des lustres. Elle s'en souciera quand Malta sera-là. Parce qu'elle allait revenir. Il le fallait.
Son nom était Lazarus Silva. C'était le Champion Sol de la Isicao et son tourmenteur depuis des années. Il avait Malta.
Impossible de ne pas reconnaitre sa moitié. Son rugissement avait tonné dans toute l'arène. Le cœur de Cynthia avait tambouriné en réponse. Glorieuse. Tel un monstre des légendes. Sa carmache. Elles s'étaient retrouvées. Elle avait regardé le combat jusqu'au bout depuis l’écran saturé d’un bar. Happée par l'action comme elle ne l'avait pas été depuis des années. Cynthia avait oublié le goût du sang, l'amertume des combats, l'excitation qui prenait la foule. Les cris, les pleurs, les horreurs. Elle devait être là. C'était sa place. Avec Malta.
En grand showman, Lazarus aimait plus que tout le spectacle. Il vivait par ça, pour ça. Alors, lorsque la petite Cynthia avec ses vêtements froissés et ses longs cheveux blonds le défia en duel, il rigola. Parce que c’était un spectacle et qu’il jouait le rôle du méchant à la perfection. Challenge accepté. Le jour même elle avait claqué toutes ses économies y compris les fonds qu’elle avait jusqu’à lors refusé de toucher dans des pokémons loués.
Elle avait plus perdu que ce qu'elle croyait mais elle avait aussi plus à gagner, sur son potable la bouille d’une petite griknot lui souriait. Travaillant sur son diplôme le jour, combattant la nuit, elle carburait à la caféine et quelques drogues qu'un ami lui avait recommandé. Les combats de l'underground étaient sanguinaires, parfois mortels et elle adorait ça. Se surprenant elle-même elle se laissait emporter dans l'ambiance du lieu. Loin de retourner à ses travers d'avant, elle dû progresser sans jamais s'arrêter car chaque défaite l'éloignait de sa moitié et la rapprochait du terme de sa location. Parfois elle s'arrêtait devant un combat de Lazarus, échangeait un regard avec sa carmache. Elle n'était pas la seule à avoir de l'ambition. Bientôt. Attends-moi, je serais plus forte. Je te le promets.
De l’équipe de Cynthia, celle qu’elle avait si longtemps chérit et entrainé, seule Malta restait. Parce qu’elle avait la rage au ventre et qu’elle n’aimait pas grand-chose. Certainement pas cet homme qui avait défiguré sa dresseuse en ordonnant à ses pokémons de la viser. Certainement pas ce showman qui perdait petit à petit la face en découvrant que l’enfant n’en était plus une et que la vie lui avait forgé des armes. Armes qu’elle comptait bien utiliser pour décapiter ce roi fou. Malta n'obéirait pas à un ordre de plus. Sa dresseuse était face à elle. Dans un grondement, elle se retourna face à Lazarus, claquant sa pokeball hors de sa main. L'Ace était de retour. Par-delà les larmes et la douleur, Cynthia hurlait. Sa rage, son désespoir, son amour pour ce dragon qui était prêt à tout risquer pour elle. Et Malta hurlait en pair. Deux âmes sœurs unies dans l’adversité. Lazarus se rendait compte que la laisse avait été brisée le moment où il avait donné le dragon à l’enfant.
La seule trace de ce combat était ce qui avait été publié dans le journal de La Isicao. « Combat de gangster dégénère, des combats illégaux, plusieurs morts ». Les adorateurs de la Team Plasma s’en servaient comme propagande. Les images floutées des corps des pokémons de Lazarus se propageaient comme de la poudre. Malta avait évolué par désespoir, par amour. Comme si une pokéball pouvait effacer le lien qui l’unissait à sa moitié. Les fondations du vieux bâtiment désaffecté où ils étaient, avaient subi des dommages à cause des attaques Explosions que Lazarus chérissait tant et qui avait emporté plus de la moitié de l’équipe de Cynthia. La carchacrock avait chargé sur le pokémon adverse, l’avait envoyé s’écraser dans un pilier. Une réaction en chaine s’était produite et tout le bâtiment leur était tombé dessus. Au final, Cynthia ne savait même pas si elle avait réellement battu l’homme. Elle allait devoir vivre avec ce doute pour toujours. Elle savait cependant qu’il était mort, parce que lui n’avait pas eu de dragon pour le protéger des débris. La violence résolvait beaucoup, mais la confiance plus encore.
Une photo de fleurs dans pot. Elle ne s’était pas attendue à avoir quiconque à son chevet. Ses amis faisaient partie de l’underground et risquaient trop à s’exposer. Pourtant, un homme se tenait à son chevet, le regard doux, un sourire gentil. Richard Jenness, le nouvel époux de sa mère. Il ne lui avait rien demandé, avait simplement veillé sur elle, s’était assurée qu’elle ait de l’aide dans sa convalescence et l’avait laissée retourner à sa vie avec la connaissance que sa mère l’avait dédouanée de toute responsabilité dans l’incident. Officiellement, elle avait simplement eu la malchance de passer par là et n’avait été qu’une victime. Le Pass de Malta avait aussi été payé. Ça ne réparait pas tout le mal qui avait été causé mais ça mettait du baume au cœur. Cynthia était ouverte à l’idée de les revoir.
La rébellion ? Peut-être plus tard. L’underground avait été pas mal chamboulé. Beaucoup de nouvelles têtes. De rares anciennes. Elle sut y trouver sa place, forte de son héritage. Elle avait tué Lazarus Silvia après tout. Elle comptait bien faire honneur à sa réputation. Quake, le séisme qui allait retourner le souterrain. La première arène clandestine se fit attraper au bout d’une semaine. La suivante se fit plus discrète. Et ainsi fit de même la troisième, puis la quatrième. Comme une masse immonde et grouillante l’underground pullulait. Abattre une branche ne servait à rien. Les mots couraient et volaient, avertissant des raids à venir. Les silences se faisaient d’or. C’était la loi du plus fort. L’Underground lui devait un œil, elle se contenterait d’un titre.
Tout de noir vêtu, elle se mit à challenger l’underground, dominant avec un style de combat plus viscéral. Elle se trouvait à l’aise dans la violence savourant l’adrénaline que ça lui procurait. Depuis la mort de Lazarus, Malta et elle s’étaient promis de vivre leur vie comme elles l’entendaient, chercher du fun, de la joie et de la passion dans tous leurs projets. C’était la moindre des choses pour honorer la mémoire de ceux qui s’étaient sacrifiés. Et pour elle, le fun c’était de taper. Taper fort.
La dernière photo importante dans l’album remonte à son diplôme. Elle avait obtenu son permis d’archéologue après de longues études. Rarement elle avait été aussi fière d’elle-même. Elle avait fait un tour sur le dos de Malta pour l’occasion, malgré le risque. Il fallait célébrer cela. Elles avaient fini au sommet de la statue. Libres.
Récemment il lui arrive d’apparaitre dans des journaux spécialisés. Lorsqu’elle n’est sur le terrain en train de jouer à Unys Jones, elle donne des conférences pour le musée de La Isicao. Son rêve actuel serait de percer les mystères de la Pyramide Précinzanne de la Pampa, elle y consacre ses recherches lors qu’elle n’est pas en train de proposer des idées d’exhibition farfelues ou de se droguer à la caféine pour rendre l’article sur lequel elle procrastinait depuis des mois. Ses nuits sont dédiées à ses devoir de Championne qu’elle fait avec un enthousiasme peu contenu, pourvu que l’opposant en vaille la peine.
Marcus travaille comme gravure de mode pour la même marque de sport qui l’avait sponsorisé. Il a complètement abandonné les combats et prêche la doctrine Caldwell, elle ne le hait que plus. Son père, fidèle à sa promesse a disparu sans ne jamais la recontacter. Sa mère quant à elle, continue sa vie, comme il en avait été depuis le début. Tout est bien. Tout est normal.
Un coucher de soleil sur les toits de La Isicao et la fenêtre d’un appartement ouvert d’où sort une alléchante odeur de curry. Voilà où se terminerait l’album, sur cette ultime photo qui ouvre un nouveau chapitre. La vie continue, l’album se remplis.
L’histoire se vit, elle se préserve et s’apprend. Elle peut blesser parfois, mais toujours, elle nous accompagne.