« Bah manuel, je veux conduire moi-même au lieu d'avoir un chauffeur. »
Il a cligné des yeux, immobile et silencieux. Il avait attendu une chute qui ne venait pas et, voyant mon air véritablement agacé par sa question débile...
« Au secours... c'est ma future femme... »
Autant dire que la journée n'avait pas très bien commencé. Quelques coups de sandale derrière la tête plus tard, nous nous étions installés dans la voiture qui me servirait à faire mes apprentissages du jour. Allen avait tranché pour une automatique, refusant de m'expliquer la différence soit disant : pour ne pas priver le monde de tant de comédie. J'avais bien failli lui en coller une et la seule chose qu'il avait pu faire pour s'en préserver était de me rappeler en se protégeant le visage que je devais garder les deux mains sur le volant. Vérité ou brillante astuce pour échapper aux conséquences de ses actes ? Le doute était permis.
« Attention Cali, dans ton angle mort ! »
Grosse panique, j'appuie sur les freins au milieu de mon virage, dans une intersection. Ça klaxonne, ça rage dans les autres bagnoles. Dans la nôtre ?
« OH NON OÙ ÇA EST-CE QUE J'AI TUÉ QUELQU'UN ?! »
« Calme toi y'a rien, mais si tu prends pas l'habitude de vérifier... »
« MAIS T'ES CON QUI EST-CE QUI FAIT ÇA ?!! »
« MAIS ARRÊTE DE ME FRAPPER ET AVANCE BORDEL TU BLOQUES LE TRAFFIQUE ESPÈCE DE FOLLE DANGEREUSE ! »
« ET POURTANT ÇA T'EMPÊCHE PAS DE FAIRE LE CON !! VAS Y, VAS DEHORS TE TENIR DANS MON ANGLE MORT QUE JE T'ÉCRASE !!! »
Au final j'étais allée me garer dans un stationnement, trop stressée pour continuer sans risquer de véritablement faucher quelqu'un. Autant admettre que c'était incroyablement frustrant de peiner autant à maîtriser quelque chose pour quelqu'un comme moi. J'avais l'habitude de la perfection, de l'excellence et des apprentissages rapides. Je n'étais pas non plus si mauvaise avec les mouvements dans l'espace, en théorie, puisque je dansais depuis ma jeunesse. C'était donc forcément la faute de mon enseignant, c'était obligé, et il était hors de question de ne pas le lui faire savoir.
« En même temps si t'étais meilleur prof peut-être que j'apprendrais plus vite. »
« Ah bah écoute, si t'es pas contente fallait demander à l'un de tes cinquante chauffeurs de petite riche de t'enseigner ! »
« J'ai essayé, mais ils m'ont tous demandé d'augmenter leur prime de risque... »
« Mais quoi ? »
« Mais ils m'ont tous demandé d'augmenter leur prime de risque ! T'es chiant !! »
Allen avait explosé d'un rire plus franc que ce que je n'ai jamais entendu sortir de sa bouche. S'en était suivit une violente course poursuite, à pied, alors que j'essayais de le faire payer en brandissant mon sac à main pour le lui asséner derrière la tête. Une scène qui avait eu le mérite de faire rire quelques passants dont la soudaine apparition suffit à me calmer. Nous devions avoir l'air amoureux alors, malheureusement, je devrais attendre de retourner à couvert avant de pouvoir l'occire. Profitant de son bref moment de répit, le grand blandinet en avait profité pour passer un coup de fil et, après avoir raccroché...
« Allez vu que tu n'aimes pas ma façon de faire, et pas du tout parce que j'ai peur de crever si on fait une deuxième séance ensemble, j'ai appelé une connaissance qui me doit un petit service pour prendre ma relève. Elle viendra te chercher demain matin à la grille. »
Ce après quoi il nous avait ramené à la résidence Wesker lui-même, refusant catégoriquement de me laisser prendre les rennes du voyage de retour. S'en était suivit une soirée plus reposante et une bonne nuit de sommeil en prévision de ce qui m'attendait au petit matin. J'avais remis mes sandales à la semelle plate, pour mieux adhérer aux pédales, vu que c'était la seule paire que j'avais à disposition qui ne soit pas des talons aiguilles. Vêtue de vêtements adaptés à la température encore estivale de cette période de l'année, sans sacrifier ma classe et mon bon goût habituels évidemment, j'étais allée attendre hors de la grille de la résidence Wesker. Le dos appuyé contre celle-ci, les bras croisés, je faisais la moue. C'était la seconde fois déjà qu'un enseignant de conduite improvisé se débarrassait de moi pour me confier au prochain. Étais-je vraiment si mauvaise ? Impossible ! C'était forcément eux qui avaient tort !
Son poképhone sonne longuement et Lorena se presse d’y répondre avant que la sonnerie ne cesse de fonctionner. C’est donc une jeune femme haletante qui répond à Allen. Elle ne peine pas à reconnaître sa voix et se souvient lui avoir donné son numéro personnel pour un retour de service. Elle en grogne presque quand ce dernier lui rappelle que c’est le dit service qui est à l’origine de son appel.
▬ Oui, dit-moi je t’écoute.
Il lui explique la situation et elle soulève un sourcil interrogatif. S’il aurait s’agit de quelqu’un d'autre, elle aurait sans doute refusé, il faut dire que ce qu’il lui demande ne lui parait pas des plus vraisemblables.
▬ Attends, mais tu habites où déjà ?
Elle avait rencontré le jeune homme dans l’Underground et chacun sait que tout le monde se connaît dans ce milieu et que tous viennent de divers horizons. Lorena se fait d’ailleurs appeler la parfumeuse et peu de personne la connaisse sous son véritable nom. Allen était donc l'une de ses exceptions. Une personne de confiance. Du moins elle le lui devait bien. Il faut dire que la jeune femme c’était retrouvé face à face avec un Alligatueur dans les souterrains de la ville. Il était intervenu en preu chevalier, faisant passer une spécialiste du type plante pour une princesse en détresse alors qu’elle s’apprêtait à faire appel à Rosaura (son herbizarre) et à battre le pokémon mâchoire. De ce fait, elle lui devait un service et aujourd’hui était le jour du paiement.
▬ Pas de problème je serais là, en plus j’ai un fournisseur qui habite San Camari, ça me fera l’occasion d’aller le voir.
Autant rentabiliser ce voyage au maximum après tout. Lorenna raccroche après un rapide aurevoir et les mains sur les hanches se fait la réflexion qu’elle n’a jamais été réellement monitrice. Ce sera bien une première mais bon il ne peut rien arriver de dramatique, pas vrai ?
Très tôt le matin, alors que le soleil n’est même pas encore levé, la jeune femme accroche une affiche improvisée indiquant une fermeture exceptionnelle de Jolifleurs. Elle pousse un long bâillement, étire ses bras sur le perron de sa boutique et cherche dans les poches de sa veste les clefs de sa voiture. Une fois le trousseau récupéré elle s’élance vers son magnifique véhicule jaune. Elle prend la route, ouvrant la fenêtre de sa voiture pour laisser l’air frais du matin lui fouetter le visage et la maintenir éveillée.
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Elle regarde une nouvelle fois son poképhone afin d'être sûr de l’adresse : Résidence Wesker. Non elle ne s'était pas trompé, la fiancée d’Allen habitait dans une résidence de luxe avec domestique et chauffeur ? L’incompréhension se voit sur le visage de Lorena tandis qu’elle sort de son véhicule pour aborder la jeune femme adossé à la grille de la bâtisse. Il doit pas y avoir beaucoup de gens qui prennent autant leurs aises et qui ne sont pas chez eux.
▬ Enchantée, je suis Lorena Flores. Allen m’a appelé hier pour que je t’aide avec une leçon de conduite improvisée.
Le sourire se veut chaleureux et Lorena se demande comment elle doit se comporter avec sa nouvelle “apprentie de conduite”. La richesse peut faire tourner la tête de bien des personnes et quand ils ont baigné dedans c’est parfois pire. De plus Lorena avait opté pour une tenue des plus classique : un vieux kimono jaune à fleurs blanches, une veste longue de couleur kaki et ses cheveux étaient ramenés en chignon à l’arrière de son crâne. Autant dire qu’on était loin d’une tenue de gala. Quelque peu gêné elle donne les clefs de sa voiture tout en s’expliquant :
▬ On va commencer doucement, je te laisse t’installer et faire les réglages nécessaires pour que tu sois à ton aise ok ?
La voiture qui s'immobilise en face de moi me fait lever un sourcil, sceptique. Petite, jaune et mignonne. Je me demande bien à quel genre d'individu elle doit appartenir. Ce serait quand même marrant de voir en sortir un géant à la mine bourrue, pour le contraste. Mais non, je n'ai aucune surprise dans le genre. À la place c'est une jeune femme douce et élégante qui en sort, vêtue de vêtements orientaux. Je commence à me dire qu'Allen a un type... Ou alors c'est une connaissance de son copain ? Vient elle aussi de Johto ? Des questions que je n'ose pas poser, juste au cas. Mais, en même temps, des suppositions qui me mettent à l'aise. J'ai moins l'impression d'avoir été refourguée à la première venue disons. J'ose croire que c'est vraiment une personne de confiance puis, de toute manière, j'ai Echidna avec moi, dans sa balle, si quelque chose tourne mal.
La dame se présente : Lorena Flores. Dois-je l'appeler Madame Flores ? La vouvoyer ? Elle me tutoie et je décide donc d'en faire de même. Est-ce la peine de lui cacher ma véritable identité ? Si elle connait Allen ne serait-ce qu'un peu alors il y a toutes les chances pour que ça ne serve à rien de passer pour une autre. Alors je m'arme plutôt de mon sourire commercial, celui que je réserve aux journalistes et aux braves âmes qui auraient le courage de m'arrêter dans la rue après m'avoir reconnue.
« Cali Cobalt, enchantée. Merci d'avoir accepté de prendre de votre temps pour m'aider. »
Je lui tends la main dans l'idée d'échanger une poignée de mains en règle, ni trop ferme et ni trop molle. Juste de quoi faire une bonne première impression et de passer pour une jeune femme active et volontaire malgré mon statut. J'espère que, si je la mets rapidement de mon côté, elle sera plus patiente durant la leçon et qu'il lui faudra plus de temps avant de comprendre pourquoi elle a été appelée en renfort. Au moins ça augure bien puisqu'elle ne paraît pas stressée ou pressée, me disant de prendre mon temps d'ajuster le véhicule pour être à l'aise.
« D'accord, merci beaucoup. »
Récupérant les clés, je vais m'asseoir à la place du conducteur. Relativement petite, il me faut ajuster le siège et les miroirs, bien que la différence avec mon professeur du jour est bien plus minime que celle de la veille. Allen me dépassant d'au moins une tête, disons que les ajustements avaient été un tout petit peu plus laborieux. Mais qu'importe. Je m'attache et, nerveuse, passe tout en revue une seconde fois. Puis une troisième. Ça ne peut pas être si compliqué que ça. Je me suis quand même bien débrouillée hier, pas vrai ? C'est quoi le pire qui peut arriver ?
« D'ailleurs j'ignore qu'elle est votre situation en terme d'assurances, mais j'aimerais vous rassurer : ma famille a amplement les moyens de rembourser quelconque dommage encouru par votre véhicule ou par celui d'un autre individu dans le cadre de cette leçon de conduite. »
J'ai sortit tout ça en parlant un peu vite, le regard fuyant, avec le ton factuel des gens qui travaillent dans le droit. Je tiens ça de mon grand frère. Une part de moi espère qu'elle n'a pas compris, ou pas tout, et n'ose pas lui laisser le temps de comprendre pourquoi je lui dis ça. À la place je retrouve mon sourire, la regarde de nouveau.
Lorena s’installe tout naturellement côté passager. Quelque peu nerveuse, elle sourit aimablement à son élève et elle comprend que cette dernière est tout aussi tendue qu’elle. La fleuriste se contente d’observer la jeune femme faire les quelques ajustements nécessaires. Elle repasse elle-même en revue ses anciennes leçons de conduite se demandant comment les transmettre au mieux. Non pas que Lorena soit très vieille, mais elle ne s'est jamais réellement pliée à l’enseignement. Elle ne doute toutefois pas de ses capacités dans le domaine.
Cali vient à parler des assurances et Lorena fait un petit geste de la main disant que ce n’était rien, qu’elle ne s’inquiétait pas pour ça. Il faut dire qu’un simple regard à la résidence devant elles suffisait à la rassurer sur les besoins financiers de la leçon.
▬ Oh ne vous inquiétez pas pour ça. Il n’y a pas de raison qu’il y ait un quelconque accident aujourd’hui. Nous serons prudentes toutes les deux.
Intérieurement la jeune femme se demande si elle doit s’inquiéter. Si elle avait été appelée c’était juste pour rendre un service entre amis non ? Et puis sans doute que donner des leçons à sa fiancée c’est bien trop engageant que si c’était un vulgaire inconnu non ? Les questions sont bien trop nombreuses et elle les chasses d’un mouvement de tête avant d’enchaîner :
▬ Oui nous pouvons commencer et si ça ne te dérange pas on va se tutoyer ce sera plus convivial. Je te laisse reculer euh… Question bête, tu es habituée à une boîte de vitesses manuelle ?
Forcément elle ne s’attendait pas à un refus et pourtant c’est bien sur une boîte de vitesses automatique que Cali à pris sa dernière leçon de conduite.
▬ Oh je vois. Il y a une grosse différence sur la manière de conduire avec une boîte de vitesses manuelle. Il y a cinq rapports de vitesse et ils s’enclenchent via une pression sur la pédale d'embrayage et la manipulation du levier de vitesses. Il faut donc une intervention humaine pour passer les vitesses, contrairement à la boîte de vitesses automatique qui comme son nom l’indique est automatique.
Lorena se penche pour lui indiquer la pédale tout à gauche comme étant l’embrayage puis elle lui montre le levier de vitesse.
▬ Le petit schéma sur le levier t’indique comment passer les vitesses. Il faut d’abord appuyer sur l’embrayage, lâcher la pédale de frein et d’accélération pour ensuite passer le bon rapport de vitesse. Du coup pour reculer tu dois d’abord embrayer, passer la marche arrière et enlever le frein à main pour ensuite accélérer. Tout ça en douceur naturellement d’accord ?
Mon instructrice du jour a une réaction qui me mettrait presque les larmes aux yeux. Pas la peine de s'inquiéter pour les assurances puisque nous allions toutes deux être prudentes et qu'il n'y aurait, du coup, pas d'accident. Je me mis pratiquement à la regarder avec des étoiles dans les yeux, si touchée à l'idée que l'on soit prêt à me faire si aveuglément confiance.
« Je ferai de mon mieux pour ne pas vous décevoir ! »
Que je dis presque solennellement, prenant fort probablement toute cette histoire de conduite beaucoup trop au sérieux. C'est que j'ai l'habitude d'être une bonne élève, de maîtriser rapidement les choses et de m'attirer les louanges de mes professeurs particuliers qui sont, d'habitude, payés par ma mère. Pour une fois c'est différent. Cette gentille dame, qui veut d'ailleurs que nous nous tutoyons pour faciliter les choses, n'est pas à la botte de Lilith Cobalt. C'est une opportunité pour moi de vraiment tester ce que je vaux et d'ébahir quelqu'un non pas parce qu'ils veulent recevoir leur chèque de paye, mais parce que j'aurai véritablement donné une bonne performance. Sauf que, avant de me lancer à l'aventure, certaines questions doivent trouver réponse. Manuel ou automatique ? Je suis gênée. J'avais eu le problème avec Allen qui, du coup, s'était mis à me rire en pleine face en refusant de m'expliquer la différence histoire que d'autres puissent, à leur tour, se moquer. C'est donc interdite que je prends la parole, les mains sur le volant.
« Je pense que c'était manuel ? Vu que c'est moi qui conduisait ? En même temps ce serait con d'assister au cours de conduite de son chauffeur, pas vrai ? »
S'il te plaît dit que j'ai raison, te moque pas. Je dis quand même pas de la merde, si ? Je veux dire je le saurais. À quel point est-ce que ça peut bien être compliqué une bagnole ?! Au minimum j'essaie de rattraper le tir, d'ajouter une précision pour détourner l'attention. Puis en vrai j'ai une vraie question de toute manière.
« Par contre hier il y avait une pédale de moins du coup... Comment je suis supposée appuyer sur trois pédales en même temps ? J'ai juste deux pieds. »
Voilà, c'est pertinent ! Je ne suis pas débile ! Enfin, je ne pense pas vu que sa réponse est un je vois qui, pour le coup, ne semble pas si hilare que ça. Ou alors elle le cache très très bien, un des deux. Le fait est qu'elle débute son explication et que, enfin, ces connaissances mystiques me sont révélées. C'est... pour passer les vitesses ? Pédale d'embrayage... Cinq vitesses... Okay ? Mais elle pourrait au moins me dire quels sont les paliers de vitesse avant de commencer ? Genre je dois changer tous les vingt kilomètres heure ? Vingt-cinq ? Je fais quoi si je dois ralentir ? Je dois tous les faire un à un dans le sens inverse ? C'est vraiment pas clair. Au moins j'ai le bon ordre, c'est déjà un début. Mais même reculer ça a l'air si complexe !
« Okay... On lâche tout, on embraye, on choisi la vitesse... C'est tout simple en fait. Aucune raison de s'inquiéter ! Même si en vrai y'a de quoi se demander pourquoi ça existe quand tu peux juste conduire en automatique... »
Ou te payer un chauffeur. Enfin, ce n'est pas le cas de tout le monde et, comme je l'avais si bien remarqué moi-même, ce serait quand même sympa de pouvoir aller et venir sans que les larbins de ma mère ne soient automatiquement au courant. Bref ! Je pèse le pied sur la troisième pédale, bouge le levier pour la marche arrière. Nickel, facile, les doigts dans le nez. Maintenant on enlève le frein à main et on est prêts pour la victoire. En théorie. Dans la pratique... J'y vais tout doucement avec le seul bémol que, en fait, je me trompe de côté, avec le volant. Alors, au lieu de nous éloigner de la bande de trottoir... On est peut-être un peu montées dessus.
« Ah... Oups... Euhm... Okay euh... Okay. »
J'essaie de remettre la marche avant, pour nous redresser, et oublie évidemment l'embrayage. Je me retrouve donc à forcer comme une débile pendant genre un bon deux secondes complets avant de réaliser que, peut-être, y'a un soucis. La lumière se fait enfin dans mon esprit et, gênée comme jamais, réitère la manoeuvre de la bonne façon cette fois. Je nous redresse, réappuie sur l'embrayage, remets la marche arrière et tourne du bon côté et.... nous voilà dans la rue. On remet l'embrayage, on retourne à la première vitesse et, sans trop comprendre pourquoi... La voiture décide de ne plus coopérer, de se plaindre, de geindre et de caler. Un rire nerveux m'échappe et, sans oser regarder la propriétaire de la voiture, je tente de faire une pointe d'humour pour désamorcer la situation.
C’est en toute confiance que Lorena sourit à sa nouvelle élève. Malheureusement le premier faux pas ne tarde pas à arriver et c’est déjà le trottoir qui en fait les frais. Rien de bien grave, une égratignure de plus sur la charmante voiture coxy. Sa propriétaire en avait fait des plus grosses en allant en forêt et pensant que la citadine pouvait se transformer en tout terrain. La jeune femme mais cette erreur sur le compte du stress, après tout Cali lui semble plus qu’à cran. Elle jurerait presque avoir vu une goutte perler sur son front parfait.
Ce n’est rien.
La demoiselle tente de se rattraper en mettant la marche avant et oublie l’embrayage. La voiture proteste à son tour.
Ce n’est rien.
La voiture obtempère quelques secondes avant de se plaindre, de geindre et enfin de caler au milieu de la route.
Ce n’est rien.
Lorena comprend mieux la raison pour laquelle on l’a appelé à la rescousse. Non pas que Cali soit un cas désespéré, mais la patience de certains pourrait être mise à rude épreuve. Respirer. Souffler. La jeune femme met quelques secondes pour reprendre les choses dans l’ordre.
▬ Bien. Le plus important c’est de ne pas te stresser. Tu peux même te dégourdir un peu les bras avant de prendre le volant parfois ça aide. Tu ne dois jamais être crispé, tu dois être souple. La voiture est ton ami et elle se laissera dompter à condition qu’on l’écoute attentivement.
Cette vision des choses était sans doute quelque peu infantile, voire infantilisante pour son interlocutrice. Toutefois, il fallait parfois faire des analogies idiotes pour faire comprendre les choses et tout bonnement faire retomber la pression.
▬ Pas besoin de se presser ou de stresser. Les boîtes de vitesses manuelles c’est plus de boulot que les automatiques mais la victoire sera plus grande quand tu l’auras maîtriser.
Voilà une phrase qui devrait redorer le blason de la jeune Cobalt et lui donner un peu plus de cœur à l’écoute de la leçon.
▬ Allez on est parti. Pied sur le frein tu redémarre la voiture en tournant la clef. Ensuite tu appuie sur l’embrayage avec le pied gauche, tu passes ta première vitesse et avec le pied droit tu appuie sur l'accélérateur. Tu ne lâches l’embrayage que quand tu sens le “point de patinage” c'est-à-dire quand la voiture à la force d’avancer. Ton pied gauche reste toujours sur l’embrayage sans appuyer. Aller je te laisse faire.
Inutile de préciser que Lorena ne s’attendait pas à une réussite immédiate, mais il n’y qu'avec l’expérience que l’on apprend.
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Son poképhone sonne longuement et Lorena se presse d’y répondre avant que la sonnerie ne cesse de fonctionner. C’est donc une jeune femme haletante qui répond à Allen. Elle ne peine pas à reconnaître sa voix et se souvient lui avoir donné son numéro personnel pour un retour de service. Elle en grogne presque quand ce dernier lui rappelle que c’est le dit service qui est à l’origine de son appel.
