Au mot «récompense» on m’a tout de suite compté de la partie. Il m’en faut peu pour solliciter mon intérêt dans ce genre d’entreprises susceptibles de briser mon ennui quotidien, mais si en plus on me promet quelques pesos au bout de la ligne j’en fais mon affaire personnelle. Le bruit a couru rapidement comme toute rumeur dans les bas-fonds de Cinza. On recherche un Pokémon, soit le classique pour une gamine précieuse d’un lord d’underground : un Evoli. Si je ne frémis pas trop à l’idée de rencontrer cette espèce, le défi représenté par cette disparition et la perspective d’une sorte de compétition avec tous ceux qui se risqueront à tenter de le retrouver ne pourrait être plus tentant. Avec un sourire d’ange donc, j’assure ma bonne participation à l’homme venu recruter quelques volontaires pour cette expédition. Celui-ci me conseille de faire équipe comme le petit renardeau semble s’être volatilisé quelque part dans le labyrinthe complexe des tunnels sous Sercena. Une Terren, faire équipe ? Il se met le doigt dans l’œil. Tanzanite et moi n’avons besoin de personne, même que nous comptons bien éliminer la compétition si celle-ci devait malencontreusement croiser notre chemin. Nous avons à cœur de réunir cette gamine avec son Pokémon, vous voyez ? Nous le voulons particulièrement.

Bon, blague à part, je dois avouer que l’histoire de cette pauvre enfant à qui on a voulu arracher son ami m’a passablement irrité. Ces mêmes lois qui font mon gagne-pain ont parfois tendance à causer ce genre de réactions chez moi, lorsque leur stupidité dépasse mon appât du gain. Oublier son Pass est quelque chose qui m’arrive régulièrement, et je voudrais bien voir quelqu’un tenter de me retirer mon Rapion. Il s’y ferait piquer certainement ! Tanz et moi prenons donc le chemin des galeries, silencieux et attentifs. Non par réelle concentration que par habitude : nous avons toujours été plutôt taciturnes l’un envers l’autre et notre lien n’est en rien bâti sur la conversation. Un bruit se fait entendre dans les tunnels et l’insecte et moi nous arrêtons pour voir passer cette fameuse compétition. Deux jeunes hommes, l’un accompagné d’un Caninos qui renifle le sol et l’autre encadré d’un Rhinoféros. Bon, la compétition est plus coriace que ce que je pensais. Peut-être que cet homme avait raison et que je ferais mieux de me trouver un allié dans cette entreprise. Partager la somme me répugne, mais perdre m’est tout aussi frustrant sinon plus. Qui pourrait faire l’affaire ?

Le hasard place sur mon chemin une jeune fille une trentaine de minutes plus tard. Je ne lui jette d’abord qu’un bref coup d’œil, assez pour la savoir jeune. Son compagnon m’intéresse davantage : une femelle Démolosse. Parfaite créature pour naviguer ces galeries. D’autant plus que j’ai quelque chose qui pourrait grandement nous servir à tous les deux. Un enfant l’avait trouvé probablement en jouant dans les tunnels avec un pote. Bref. J’ai en ma possession un ruban appartenant à l’Evoli, ruban qui porte donc son odeur. Je le garde dissimulé dans ma poche pour le moment avant de lever les yeux vers l’adolescente. Une chevelure de jais encadre un visage volontaire. Ses prunelles luisent de vie et d’audace. Aussitôt elle me plaît bien. Malgré son jeune âge elle possède un feu intérieur qui me rappelle le mien à son âge.

«Bonsoir, tu cherches aussi l’Evoli ? Nous cherchons depuis un moment déjà, quelle histoire… Je crains que mon Rapion ne soit pas le Pokémon le plus adapté pour la recherche, mais peut-être que si on faisait équipe ?»

Je peine à réaliser que j’ai proposé cette idée. J’espère que l’adolescente ne me ralentira pas trop. Mais j’ai besoin du flair de son Démolosse. Désespérément.

«Nous savons nous débrouiller pas trop mal en combat.» je fais avec mon habituel sourire mi-hilare, mi-nonchalant. Évidemment je ne vais pas lui révéler que je suis la Championne de la Cage de Pavlica. Si elle a fait ses devoirs, elle saura. «Les Pokémon de ces galeries sont coriaces après tout.»

D’ailleurs, j’entends quelque chose non loin. Si l’adolescente accepte, je lui révélerai le ruban, mais sinon… À suivre.

Dé Zone Pics de Niebla + Sexe + Niveau

Clairement, mon discours de vente ne l’a pas plus impressionnée que cela. À la manière dont ses prunelles ont bifurqué vers nous, je comprends qu’elle nous a probablement reconnus; elle est donc une habituée de ces galeries, du monde underground et fort à parier aussi qu’elle sait aussi combattre. La fière Démolosse à ses côtés le suggérait aussi, mais à présent je ne fais plus de rapprochements aussi faciles considérant le nombre de challengers que j’ai vu accompagnés par d’imposants alliés sans toutefois être en mesure de les diriger. À suivre de ce côté. Vu la population locale envahissante de ces montagnes, je ne crains pas de le découvrir sous peu. Je ne perds rien de mon sourire malgré l’attitude plutôt provocatrice de l’autre. Dans ce monde qui est le mien c’est chacun pour soi, je ne m’attendais donc pas à ce qu’elle me saute dans les bras cette jeune fille. Bien au contraire, sa réserve me rassure. Cela prouve au moins qu’elle a une tête sur les épaules et quelques neurones fonctionnelles. Clairement je ne suis pas quelqu’un à qui on devrait octroyer sa confiance sur un coup de tête. L’inverse aurait été passablement décevant.

Puis bon, elle a raison, elle n’a pas exactement besoin de moi. De ce qu’elle raconte, elle semble être une native de Sercena ou du moins avoir une grande habitude de ces galeries où je ne suis moi-même qu’une simple renseignée, oeuvrant avec une aise approximative. J’hausse donc les épaules.

«Faut être un peu con pour se paumer à point. Après, il y a toutes sortes de gens à Cinza.»

Je n’en fais pas partie. J’ai toujours eu une certaine facilité à naviguer, à me repérer dans l’espace. À me souvenir des chemins tracés. Mais rien n’équivaut l’expérience d’une habitante de la ville et le flair d’un chien bien dressé, ce que semble être la Démolosse. Je dois augmenter la pression et la convaincre ou elle risque d’être une adversaire de taille dans la recherche de l’Evoli. J’aime bien son côté si direct et franc, au moins nous savons à quoi nous en tenir. Elle me plaît de plus en plus cette petite.

«C’est une bonne question, je n’y avais pas trop réfléchi. Je vois que tu n’es pas là pour te faire des amis; c’est dommage tu avais l’air sympa.»

Un sourire amusé passe sur mes lèvres. Évidemment que je plaisante, mais c’est probablement car j’ai envie de voir un peu plus de ce caractère qui est le sien. Cependant en affaires il vaut mieux ne pas trop faire tourner en bourrique le client, sinon il risque de partir voir ailleurs. C’est à mon tour de livrer la marchandise, je tire donc le ruban que j’ai trouvé tout à l’heure de mon sac.

«J’ai trouvé ça sur le chemin. Aucune façon d’être certaine si ça lui appartenait à lui, mais il me semble que ça ressemblait vachement à celui que le renardeau portait sur la photographie qu’on m’a montré. Si tu acceptes ma proposition, je te donne le ruban et te ramène là où je l’ai trouvé, puis on suit sa trace ensemble. Sinon tant pis, je retourne d’où je suis venue.»

Encore une fois j’hausse les épaules. Au pire, cet échange aura été une perte de temps. Au mieux j’aurai trouvé ma partenaire idéale. Je l’observe avec un calme presque désintéressé, quand un mouvement dans l’obscurité me tire de cet échange. Un Scalpion s’avance et je le considère sans intérêt : il fera un bon entraînement pour ce Démolosse et l’occasion pour moi de le voir en action.

La posture de l’adolescente se montre aussitôt plus ouverte maintenant que je lui ai donné une raison d’écouter. J’aurais préféré garder cet élément pour moi un peu plus longtemps, appelez ça mon esprit de contradiction d’une certaine manière. Ce ruban, je l’ai déniché et il m’offre une chance inestimable de repérer l’Evoli et récupérer la cagnotte. Ma nature profonde rejaillit et je me recule quelque peu en voyant la jeune fille approcher pour considérer à la fois l’objet et l’offre. Je n’ai pas l’habitude du tout de faire équipe après tout. Je préfère largement garder mes atouts pour moi-même, mais cette fois je ne parviendrai pas à mes fins sans l’aide de la noireaude. Nous le savons toutes les deux : nous serions plus fortes en jumelant nos efforts. Elle-même capitule finalement devant l’offre présentée et je joins un grand sourire à son accord. Tant mieux. En plus, la Démolosse connaît déjà bien l’odeur caractéristique de cette espèce de renardeau ? Encore mieux. Ce sera une affaire vite bouclée, de l’argent dans mes poches et la perspective d’avoir gagné pour m’alléger. J’aime gagner. J’aime beaucoup même.

Je laisse donc mon attention devant la chienne de Dana qui ne fait littéralement qu’une bouchée de son adversaire. Amusée par ce spectacle pathétique pour la pauvre Scalpion, j’applaudis devant l’œil désintéressé du Rapion. Lui-même aurait rencontré beaucoup plus de résistance au vu du type de la créature. Il valait mieux donc que je lui laisse cet adversaire. Le prochain sera à lui, mais pour le moment Tanz ne semble pas trop pressé de faire ses preuves. Je redresse la tête cependant à la mention d’une autre personne dans la galerie et sent mon sourire se faner quelque peu. Ah. On dirait qu’elle n’était pas seule l’adolescente. Un jeune homme nous rejoint, et l’air de famille est indéniable. Galette de Tauros. J’aurais vraiment préféré éviter de faire de ce duo une petite fête en soi. Je ne laisse cependant pas cet imprévu m’assombrir, même que sa venue n’en finit pas de m’amuser, du moins en surface. Au fond, tant que j’ai toujours ma moitié des revenus, je ne ferai pas la fine bouche. C’est ce que Dana a dit non ? Moi j’ai retenu que j’obtiendrais 50% du butin, le reste m’importe peu. Quand même, pour moi qui déteste faire équipe, me voilà bien servie. Si j’étais d’humeur, j’en rirais aux éclats.

«Bah c’est très bien, salut Jayce, enchantée de faire ta connaissance,» je fais avec une révérence théâtrale. «On me surnomme Bruxa dans le coin, mais vous pouvez m’appeler Dora, ça fait aussi. Je voudrais bien rester et discuter, mais si on veut retrouver cet Evoli et le rendre à sa tendre maîtresse, il vaudrait mieux s’y mettre.»

Puis le Scalpion écarté, nous avons tout le loisir de nous aventurer dans les galeries. Ce que je fais sans plus attendre, menant les deux autres vers l’endroit où j’ai retrouvé le ruban en premier lieu. De là, la Démolosse pourra flairer le ruban. Pour l’instant je le conserve encore dans mon sac. Je réalise être particulièrement taciturne depuis un moment, ainsi je tente d’engager la conversation. C’est ce que font les partenaires d’équipe… je crois.

«Alors les jeunes, vous êtes des habitués des galeries, vous êtes pas un peu jeunes pour le monde underground de Sercena ? Qu’est-ce qui vous a poussé vers l’illégalité?»

Je dis ce dernier mot avec énormément de légèreté et d’amusement. Malgré moi je suis bien curieuse de savoir leur histoire à ces deux-là. Nous avons tous nos raisons pour vivre de cette manière… quelle est la leur ?

Nouveau dé zone + sexe + niveau

Ce n’est jamais bien méchant; quoique l’impulsion se discute en elle-même. J’aime l’éclat, la réaction. Même si celle-ci émane d’une douleur. Il ne faut pas être très allumé pour deviner que de si jeunes personnes ne traînent pas par ici par hasard. J’ai beau ne pas être la plus perceptible, leur détermination un peu farouche ne fait aucun doute. Ils me rappellent beaucoup d’autres gamins blessés qui oeuvrent dans ce monde qui est le mien. Je réalise ma chance : j’y suis par choix et par envie, pas par dépit, pas parce qu’il ne me reste rien à espérer de plus. Au final, la différence entre les récits de tous ceux qui marchent dans ces galeries ou les autres mondes underground de Cinza attise une curiosité certes malsaine et mal placée, mais qui me permet de me faire une meilleure idée de monde que la jeune fille décrit comme étant de la «merde». Je n’ai jamais jugé mon existence ainsi, bien loin de là, même si je me fais chier quand même à l’occasion. Et une part de moi se demandera toujours ce que ça fait de souffrir réellement. Puis je me souviens de maman, je me souviens de Camila. Peut-être que je devrais arrêter de courir après le désespoir, car il finira bien par se pointer.

«Je l’ai trouvé dans un genre d’antichambre, il y avait un petit ruisseau et un tas de couloirs qui en sortaient. Cet endroit est un labyrinthe, j’ai donc pris un chemin au hasard et je suis tombée sur vous. Visiblement ce n’était pas le bon tunnel.»

Il faudra donc retenter le coup dans un autre de ces tunnels que le petit Evoli aura certainement emprunté. Le Démolosse nous y aidera à coup sûr. La méfiance du chien des enfers ne fait aucun doute et je lui adresse mon plus gros sourire pour y répondre. Ma question trop directe, trop bouleversante, la fait tout autant réagir que sa maîtresse. Mon estime pour elle ne fait qu’augmenter face à sa fougue, qui me rappelle un peu celle de ma sœur. Sauf qu’elle ne se serait pas gênée de m’envoyer promener probablement. Elle reste polie la Dana. Du moins pour le moment. Je réalise que je suis allée trop loin à son goût. Il y a là des sensibilités que j’aimerais explorer, mais il vaut mieux pour le moment laisser tomber. J’ai plus besoin d’elle qu’elle de moi, nous le savons bien toutes les deux.

«Tu as parfaitement raison, Dana. L’âge n’a jamais eu d’importance à mes yeux. Par contre je sais que plus jeune on entre dans ce monde, plus intéressants sont les récits qu’on peut raconter. J’aime entendre les histoires des autres, je suis toujours curieuse de découvrir des mondes différents du mien.»

Je ne cherche pas à m’excuser car ce serait d’agir contre ma nature. Cette explication, pour une fois, était parfaitement sincère. Rien n’apaise plus ma curiosité que le récit d’une vie aux antipodes de la mienne. Dans la fougue de sa jeunesse, Dana cherche à préserver cette histoire qui est la sienne, et à n’en pas douter la souffrance qui vient avec. Je décide de changer d’approche pour quelque chose d’un peu plus bancal. Pas trop quand même. Pourquoi ne pas rendre l’utile à l’agréable quand même ? Je suis de ceux qui apprécient la conversation après tout.

«Tu combats des fois avec ta Démolosse ?»

Je me penche un peu plus pour voir la créature, au beau pelage noir brillant. Un fier spécimen, que j’adorerais combattre en d’autres circonstances. J’en ai croisé plusieurs dans les opérations familiales et je dois dire que j’ai un faible pour cette espèce. Bien plus intéressante qu’un Evoli à mon humble opinion. Je repère finalement la salle où j’ai trouvé le ruban. Malgré les nombreux rochers plus ou moins semblables, j’ai tôt fait de pointer celui qui nous intéresse.

«Voilà, c’était l…»

Je m’arrête car un Marcacrin vient de faire son entrée et semble garder ce-dit rocher. Bon, c’est un adversaire coriace pour mon Rapion, surtout qu’il semble être bien déterminé celui-là. Je souris avant de faire signe à mon ami. Notre tour de montrer de quel bois nous nous chauffons.

Si j’en avais quelque chose à foutre, j’aurais pu remarquer à quel point ma curiosité débordante met mal à l’aise ma jeune interlocutrice, ou les échanges silencieux que la fratrie et leurs Pokémon se livrent tous ensemble. À vrai dire, je m’en bats les couilles de ses petites émotions d’adolescente ou de son vécu tragique. Tout ce qui m’intéresse est une bonne histoire. Personne n’a jamais épargné mes sentiments, c’est ainsi qu’on se forge un caractère moi je dis. Cependant je ne trouve aucune raison d’être cruelle, ce n’est pas exactement dans ma nature sauf si on m’y pousse et j’ai bien compris que les questions ne seraient pas bien perçues. Cependant mon intérêt à poursuivre mon observation s’est arrêté là, ainsi j’ai tout loupé de ce qui s’est dit sans mots derrière mon dos. L’affaire est close pour moi et ne change en rien l’opinion que je me fais de la gamine. J’ai décidé que je l’aimais bien, car elle a du feu en elle, un feu que j’aimerais bien tisonner si j’avais plus l’occasion. Nous devons collaborer pour le moment alors ce n'est pas trop le temps de jouer avec le feu. Tant pis, ça m’aurait plu. Elle a de ces caractères qu’on n’oublie pas et sa présence restera avec moi longtemps après notre rencontre.

Pareil pour le Marcacrin qui se présente à nous. Je n’avais jamais réfléchi à cette espèce, mais c’est vrai qu’il est vachement mignon quand même. Bien plus qu’un Evoli à mon sens. Sa fourrure épaisse et rêche, son petit nez de cochon, son appétit monstre. Je pense qu’il aurait plu à Syrius aussi. Il a piqué mon intérêt et c’est avec plaisir que je prends ce combat. On pourrait nous croire désavantagés ici au vu du type de la créature, mais j’ai confiance que mon Rapion pourra renverser la vapeur facilement si on lui en donne la chance. Ce que je veux lui offrir bien entendu. Il débute donc avec un Aiguisage qui fait un moment luire sa carapace. Je me retourne vers la jeune fille qui demande son ruban, un sourire sur les lèvres. Pour la mettre de mon côté, j’ai intérêt à lui montrer que je lui fais confiance, ce qui n’est pas le cas du tout. Prendre un risque calculé, ça je peux faire.

«Très bien, Dana, prends le Ruban. Mais t’as pas intérêt à disparaître sans moi car je te jure que je te retrouverai.»

Mon sourire et la bonne humeur de mon ton ne m’ont pas quitté, mais mon regard jette un avertissement d’autant plus sincère. Je ne vais pas la laisser partir avec notre prix, cependant je reconnais l’utilité de gagner du temps. Avec un second Pokémon, j’aurais pu assurer la surveillance… Un jour je devrais le considérer à vrai dire. Ce serait vachement utile. Si papa ne se montrait pas si fermé à cette idée. Je prends une grande inspiration avant de reporter mon attention sur le combat, laissant les deux jeunes, le Lucario et le Démolosse ensemble. Je me concentre sur le combat tout en gardant un œil prudent sur eux. Si notre lien à Tanzanite et moi n’est pas évident au premier coup d’œil, il se dévoile tout entier. Nous bougeons en parfaite harmonie, prenant un évident plaisir à combattre.

Bon, la menace ne semble pas trop l’impressionner mais dans tous les cas, je doute qu’elle ne s’enfuit avec le buti… euh je veux dire le pauvre petit Pokémon sans défense que nous devons retrouver. Elle a du cran cette gamine je dois le reconnaître. La voyant se mettre à l’investigation de la piste du ruban, je ne peux réprimer un sourire un peu plus sincère; avec tous ses piquants elle est loin de se douter à quel point je l’apprécie cette noiraude. Il me tarde de retourner à la chasse au mignon petit Evoli (eurk), mais pour le moment cet adorable Marcacrin (bien mieux) nous occupe. Je me dis en l’observant que cette créature serait probablement heureuse dans une ville comme Pavlica. Il a la couenne dure et un esprit combattif. Ce serait pas mal non ? Dans une autre vie, je n’aurais pas hésité à le capturer et en faire mon nouveau compagnon, mais les choses sont un peu différentes maintenant. Nous devrons nous contenter de lui donner une raclée. Quel dommage.

Bon, je comprends le Marcacrin d’utiliser sa Poudreuse, mais a-t-il autre chose dans son arsenal pour nous ? Mon ami le Rapion ne semble pas du tout apprécier ce nouveau courant d’air frais et proteste avec un éternuement qui se fait entendre dans toute la caverne. À son grand dam, j’éclate de rire devant ses mésaventures. Il grogne face à mon hilarité avant de riposter à l’aide de son dard qui fait reculer le petit cochon. Malgré toute son assurance, un léger tremblement dans ses pattes indique qu’il cèdera sous peu. Il n’y a qu’à lui porter le coup fatal, ce que nous nous empressons de faire. Satisfaite de la performance de mon petit Rapion, je lui offre une baie bien épicée telle qu’il les aime avant de me retourner vers le petit Marcacrin qui s’est affaissé contre lui-même. Je soupire avant de m’approcher de lui. Prendre soin des créatures sauvages n’est pas exactement mon genre; or celle-ci a su me charmer je dois avouer. Je lui offre donc une baie à son tour, cette fois une baie Oran qui lui rendra un peu de sa force. Le petit jette d’abord un regard méfiant au fruit avant de se laisser tenter par son appétit débordant. Je souris avec satisfaction en le voyant manger. Avec tout ça j’en ai presque oublié la raison de ma venue dans ces couloirs de roc. Je me redresse donc, un peu gênée de me montrer aussi conciliante. Une attitude qui ne semble pas trop plaire à Tanzanite.

«Oui bon, c’est bon hein. Calme-toi un peu.»

Un peu boudeuse, je m’éloigne pour suivre les adolescents qui, au final, ne se sont pas aventurés trop loin. J’ai les mains dans les poches alors, nonchalante mais comme préoccupée. Un peu dans ma propre tête, je marmonne un :

«Il était mignon ce Marcacrin n’empêche…»

Avant de renifler et de reporter mon attention sur les deux jeunes. Tanzanite, excédé par l’intérêt que je portais à son adversaire, s’éloigne en grognant en direction du Démolosse, histoire d’investiguer à ses côtés. Je le laisse partir cette fois sans sourire, encore préoccupée par ce combat bien malgré moi. Il est des jours où les lois cinzanes s’abattent sur moi avec force. Non préparée à cet excès de frustration vis-à-vis notre réalité, je peine à me remettre l’esprit à notre tâche.

«Vous avez déjà capturé des Pokémon un jour ? Je veux dire… avant.»

Avant. Ce mot si vague et pourtant si évocateur. Je ne me reconnais plus, ce Marcacrin a vraiment provoqué quelque chose en moi que j’aurais préféré tranquille et taciturne. Je soupire avant de secouer la tête. Je n’attends pas vraiment de réponse de leur part, mais cette fois ma question ne venait pas d’un excès de curiosité mais plutôt d’une forme aigue de déception et d’amertume qui vient, parfois, quand je me souviens du projet que je tissais à une autre époque, celle de suivre les traces de ma mère et de devenir dresseuse.

«Vous avez trouvé la piste ?» je fais finalement en tentant de me reprendre.